Association Républicaine Poulain-Corbion

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Lettre au Président de St-Brieuc-Agglomération 14 Mai 2012

 

Saint-Brieuc le 14 mai 2012

 

Monsieur Michel LESAGE
Président de St-Brieuc Agglomération


Monsieur le Président,


Lors de la séance du 29 mars dernier, l'assemblée de Saint-Brieuc-Agglomération a décidé d'ajourner le vote d'une subvention au Monument Poulain-Corbion, pour la raison exprimée par un élu, que " selon des recherches récentes, le personnage ne correspond pas exactement à la légende communément admise" (Le Télégramme du 30/03/2012). Allusion aux déclarations et à un livre à paraître (à cette date) de Jean Kergrist.


Suite à cette décision nous vous avons fait parvenir deux textes : "En défense de Poulain-Corbion et de la République" et un compte-rendu du livre "Qui a tué Poulain-Corbion ?" (Jean Kergrist Ed Les Montagnes Noires) textes dans lesquels nous développons notamment la caractéristique des biens nationaux vendus sous la Révolution pour abonder le budget national, et nous y soulignons qu’aucune preuve de prévarication n’est apportée par l’auteur.


Le journal Ouest-France dans son édition du 7/05/2012 revient sur cette question à propos d’une interview précédemment donnée par l’auteur :


" L'écrivain breton Jean Kergrist lui (Poulain-Corbion ndr) a récemment consacré un livre. Dans la transcription des propos de son ouvrage, nous lui avons par erreur prêté l'accusation selon laquelle Poulain-Corbion aurait tiré parti de ses fonctions de président du tribunal de commerce pour s'enrichir sur le dos des biens nationaux. Et notamment d'avoir acheté de cette manière le château de Saint-Vréguet, à Saint-Alban.
Or, l'écrivain récuse ses propos puisqu'il écrit dans son livre qu'il en a hérité de son arrière-grand-père d'Argaray...(page 138 de Qui a tué Poulain-Corbion ?")".


On constate que l’auteur, qui en avait pourtant l’occasion, ne reprend nullement l’accusation d’enrichissement frauduleux « sur le dos des biens nationaux ». La raison implicite de ce silence, en est que, dans ce livre, à aucun moment on ne trouve la preuve d'une prétendue prévarication de l'ancien maire et député de Saint-Brieuc.
Pour éclairer davantage l’historique du monument , nous pouvons rappeler, que dès l'année suivant sa mort tragique (donc dès 1800), alors donc que les péripéties de sa vie étaient présentes dans tous les esprits, l'Assemblée départementale évoquait l'édification d'un monument en reconnaissance aux mérites de Poulain-Corbion.


On relèvera aussi, qu’après la défaite de Waterloo en 1815, suivie par le retour des Bourbons (La Restauration sous Louis XVIII et Charles X) et des émigrés, donc très peu de temps après la mort de Poulain-Corbion, il aurait été aisé en ces temps de revanche (La Terreur blanche ), de dénoncer les malversations éventuelles perpétrées pendant la Révolution de l’ancien maire et député de Saint-Brieuc. Il n’en fut rien.


Quelques années plus tard, en 1868, une plaque commémorative de sa mort violente était apposée sur le mur de la cathédrale ( l'actuelle date du lendemain de la seconde guerre mondiale).


En 1889, au moment de l’édification du monument par Pierre Ogé, les adversaires de la jeune IIIème République auraient eu l’opportunité d’ouvrir un dossier d’accusation. Mais ni Charles Pradal, avocat et Maire, ni Charles Baratoux, Conseiller Général puis Maire, n’ont eu le souci de devoir défendre l’ancien procureur de la commune tant il était au-dessus detout soupçon. Ce que confirme s’il en était besoin le parrainage des « autorités morales » comme Ernest Renan, Jules Simon, Waldeck-Rousseau ou encore Leconte de Lisle.


On soulignera que parmi tous les historiens , Geslin de Bourgogne, Lamarre, Jaurès, Gaignoux, Lavoquer, Demouveaux, Lebel, Minois, qui ont étudié l'histoire de Saint-Brieuc sous la Révolution, et dont certains ne lui étaient pas nécessairement favorables, aucun, nous insistons, aucun n'a mis en cause l'honnêteté du républicain briochin.


Ajoutons encore que lorsque les occupants allemands exigèrent, avec le soutien de Vichy, de récupérer les métaux non-ferreux des statues en bronze, il ne vint à personne, et même pas au préfet vichyste, de justifier par le discrédit, le démontage du monument Poulain-Corbion.

 

On peut même relever qu’un journal de l’époque (La Croix) mentionnait ainsi, à cette occasion, le passé glorieux de l’ancien maire : « Certains de vos gestes, le souvenir des services que vous avez rendus avaient secoué l’indifférence de vos concitoyens, au point qu’ils veuillent vous exprimer leur gratitude (…) en érigeant sur une place de la cité, votre personne en métal… ».


Et alors que le climat de Vichy et de la Révolution nationale aurait été favorable à la stigmatisation d’erreurs ou de faiblesses de l’ancien commissaire du Directoire, il n’en a rien été.


On sait aussi que le Maire de Saint-Brieuc de l’époque (Emile Chrétien) obtint des autorités allemandes l’autorisation de faire prendre le 24 mars 1942, des photographies du monument dans le dessein de refaire un jour la statue : elles sont aujourd’hui conservées aux Archives Municipales.


Concernant le socle de granit, les pièces démontées furent transportées et rangées au chantier de la ville, Boulevard Pasteur, le Directeur des travaux municipaux précisant « de façon à permettre éventuellement la reconstruction du socle ».


Et à une interrogation (Lettre du 1er août 1943) du petit-fils de Jean Hue (le tailleur de pierre du socle), le Maire confirmait que les pierres taillées du socle « pourront être reprises en temps voulu… » , ajoutant ces fortes paroles à valeur d’engagement : « le souvenir des hommes glorifiés par nos prédécesseurs ne périra pas et nous nous efforcerons de rétablir dans la paix ce que la guerre aura détruit ».


Bien sûr, dès la fin des hostilités sur notre territoire, la question de la réédification des statues enlevées sous l’occupation se posa. Ainsi, le 19 février 1945, le Préfet demande-t-il au Maire « …si votre conseil municipal désire les voir remplacer par des oeuvres en pierre ».(Lettre du Préfet du 19 février 1945).


Mais les difficultés de la reprise économique après la guerre ont orienté les préoccupations des élus vers les solutions d’urgence que dictait la situation.

 

On sait que nombre de villes ont toutefois refait les statues détruites. Ainsi pour Rennes, le Monument Leperdit, ou encore Fougères, pour le Monument Lariboisière (statue équestre).

 

Dans les années 60 Antoine Mazier affirmait encore à Pierre Le Mée, son intention de refaire le monument.


Monsieur le Président, à la lumière de l'examen objectif des hésitations qui ont pu légitimement vous amener à suspendre le vote d'une subvention, vous pouvez reprendre en toute sérénité le dossier du projet du Monument Poulain-Corbion emblématique de la République. Et nous restons à votre disposition pour répondre à toutes vos interrogations éventuelles.


Veuillez agréer, Monsieur le Président, l’expression de nos salutations républicaines.


Pour le bureau,
Edouard Le Moigne



29/05/2012

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